Il faut que je vous avoue un secret jusque-là bien gardé : je sais d’où me vient mon envie d’exotisme, de voyages, d’aventures. Ce goût qui m’a fait choisir l’option « tropicale » en troisième année de l’Agro, alors que mon seul voyage ultramarin m’avait amené dans la banlieue de Londres, où je m’étais ennuyé comme un rat mort pendant les quatre semaines de mon séjour, un échange de lycéens comme il s’en organisait déjà à l’époque, peu de temps après la guerre.
En fait c’est dans la chambre de bonne de mes parents, au 6ème étage du 134 de la rue de Sèze à Lyon, qu’ont surgi ces rêves fabuleux. Papa y avait gardé une collection de romans superbement illustrés comme on les éditait entre les deux guerres, avec de magnifiques gravures. J’y ai dévoré une grande partie des romans de Jules Verne, mais le joyau, c’était celui de Paul d’Ivoy, le Docteur Mystère, qui se déroulait dans l’Inde des savanes du Nord-Ouest, l’actuel Pakistan, au XIXème siècle.
Ce troublant docteur, d’origine britannique, circulait dans un bus aménagé en laboratoire, équipé d’instruments fantastiques permettant de fabuleux voyages dans le temps et dans l’espace. Doté de pouvoirs extraordinaires, il domptait les animaux les plus féroces et accomplissait des exploits hors du commun. J’étais conquis.
Pour couronner le tout, j’étais fan de James Fenimore Cooper : son héros était un explorateur de l’Ouest des futurs USA et du Canada, au milieu des indiens.
Combien d’heures n’ai-je pas passé là-haut, ado, la tête pleine de rêves ? Et voilà pourquoi on ne rêve pas de carrières raisonnables, dans les engrais, les aliments du bétail ou les pesticides, et que je vis actuellement dans l’obsession de l’avenir des paysans sahéliens.
A mon grand regret, ma sœur a bazardé tous ces merveilleux ouvrages, qui auraient si bien trouvé place dans ma bibliothèque. Tenniswoman professionnelle, sa tête était pleine d’autres rêves.
Quitte à ouvrir le tiroir des secrets, je vais vous en livrer un autre : j’ai une vraie fascination pour l’Inde rurale, et en particulier les indiennes en sari ; jeunes ou vieilles, belles ou laides, riches ou pauvres, elles ont toujours beaucoup d’allure. A défaut de m’y rendre, je me contente de comédies insignifiantes, mais dont le spectacle me régale. Si vous avez les mêmes faiblesses, ne ratez pas « Coup de foudre à Jaïpur ». Dépaysement garanti.