Il s’agit d’une version tropicalisée de notre belote nationale, telle qu’on la pratique des bistrots de la canebière aux tripots lillois. Cette version n’est pas perverse, différant en cela de la belote « faux-jeu », elle aussi tropicale, spécialité sénégalaise et malienne, laquelle consiste à tricher sans être pris (p.ex.: je coupe et j’en rejoue). A la maigre lueur d’une lampe à pétrole, sous le ciel étoilé du Sahel, il faut un œil attentif pour repérer les mauvais coups.
Mais je vous parle d’une version brésilienne, pratiquée en famille en septembre 1995, sur le rio Pantanal : nous étions en vacances (j’étais à l’époque basé à Brasilia). Nous avions embarqué sur le Freteiro II : un drôle de bateau certes, mais qui navigue, que lui demander de plus ? Imaginez une boite d’allumettes (grand format) collée verticalement à l’extrémité d’une boite de sardines ; multipliez par le facteur d’agrandissement nécessaire pour loger neuf passagers et trois membres d’équipage, et vous aurez l’allure générale du bâtiment. Hors des eaux du Pantanal (lames de 20 cm par gros temps), on peut douter de sa capacité à naviguer. Le Tapajos, les jours de tornade, lui serait fatal. Que dire de l’Océan ? Il n’y parcourrait pas un mille-marin.
Mais pourquoi faire la fine bouche, et ne pas se satisfaire de ses allures de bateau-lavoir aménagé pour le tourisme écologique ? On y trouve des châlits, un carré-cuisine (4 m2 en comptant large) et un coin toilettes tel qu’on peut les imaginer dans un sous-marin. La boite de sardines est recouverte d’un toit de tôle ondulée, protection appréciée contre les ardeurs solaires. Sur le pont (50 cm au mieux au-dessus de l’eau), un bric-à-brac fonctionnel : fût de gas-oil, quatre chaises et une table métallique, façon Conforama, évier double-flux pour la vaisselle, cannes à pêche, garde-manger/glacière… Quoi encore ? une ancre, quelques cordes d’amarrage, des crochets pour hamacs, et un tapis de sol qui a dû faire la guerre du Chaco.
Nous ne sommes que quatre passagers (Geneviève, Elisabeth, Gwendal et moi), mais l’équipage est composé de trois personnes : Dom Benito, maitre à bord après Dieu, Donha Lucia, son épouse, et Bernardo, le moussaillon, une sorte de Quasimodo du Pantanal. Donha Lucia est charmante, attentionnée ; elle adore Gwendal (13 ans à l’époque) et lui apprend tout ce qu’elle sait, y compris la broderie. Elles semblent avoir beaucoup à se dire, papotent sans arrêt, chacune dans sa langue. Donha Lucia prépare toute la tambouille, du « café da manha » au « jantar »; elle a le secret de potions magiques, dont une infusion à base d’ail et de citron vert qui devrait figurer dans le guide Michelin des infusions campagnardes. Dom Benedito est imposant à tous égards : physique de demi de mêlée, calme olympien même quand son moteur le trahit. C’est le roi de la chasse – jacaré compris – et de la pêche; c’est avec lui que Gwendal a acquis ses titres de championne de pêche au piranha (des dizaines de victimes sagement rangées sur le pont). Il est aussi spécialiste du « bird watching »: la découverte écologique, avec lui, est garantie. Ex militaire de carrière, originaire du Sud, il a débarqué à Cáceres il y a douze ans pour ne plus quitter le Pantanal ; encore un intoxiqué.
C’est une autre forme d’attention qu’il faut exercer à la belote « jacaré », puisqu’il s’agit de remarquer et compter les crocodiles (« jacarés » au Brésil) au cours de la partie. Bien entendu, on joue le long des cours d’eau où ils abondent; le Pantanal s’y prête bien. Les joueurs, confortablement installés, apportent donc une double attention, aux cartes d’un œil, et aux rives de l’autre. Chaque fois que l’on aperçoit un de ces sauriens, le nombre de points du coup en cours est multiplié par deux. La part du hasard, déjà heureusement élevée à la belote, s’en trouve sensiblement accrue. Il est donc prudent de se munir d’ingrédients propices à une discussion prolongée et sereine : on peut recommander la « caïpiriha » brésilienne, pour laquelle Geneviève a une petite faiblesse qu’elle se refuse d’avouer
Si l’on s’adonne à la belote jacaré dans le Pantanal, on peut, entre deux parties
écouter, à l’aube, la séquence enchanteresse des questions-réponses entre espèces d’oiseaux, ou les querelles de familles des perroquets (nombreuses et virulentes).
Une croisière sur le Pantanal, à bord du Freteiro II: une alternative au tourisme de masse !
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